34 fans | Vote
Pour poster sur ce forum, tu dois t'identifier
Stephen KingCAPRICE  (14.01.2006 à 18:07)
Afin de faire découvrir à certains l’univers de Stephen King je vous propose d’apposer ici des extraits des livres qui vous ont marqué, les postfaces ou encore un résumé détaillé. Ceci pour rallier les irréductibles ;-)
D’autres dans le même genre sont les bienvenus également…
LA PART DES TENEBRESCAPRICE  (14.01.2006 à 18:09)
...C’est l’infirmière assistante de la salle d’op qui vit la chose la première.
Son cri strident eut quelque chose de sacrilège dans la salle où, depuis un quart d’heure, on n’entendait que les ordres donnés dans un murmure par le Dr Pritchard, le sifflement doux de la volumineuse machinerie d’assistance et les courts jappements suraigus de la scie Negli.
Elle chancela en arrière, heurta un plateau roulant Ross sur lequel étaient soigneusement rangés près de deux douzaines d’instruments et le renversa. Il heurta le sol carrelé avec un clang ! retentissant, suivi par toute une gamme de tintements moins forts.
« Hilary ! » vociféra l’infirmière chef d’une voix à la fois stupéfaite et scandalisée.
Elle s’oublia elle-même au point de faire un pas en direction de la jeune femme qui reculait dans l’envol des pans de sa blouse verte. Le Dr Albertson, l’assistant de Pritchard, donna un coup léger au mollet de l’infirmière du bout de son chausson. « N’oubliez pas où vous vous trouvez, s’il vous plaît.
- Oui, docteur. »
Elle se retourna aussitôt, sans même regarder la porte de la salle d’opération qui cogna bruyamment lorsque Hilary fit sa sortie de scène, hurlant comme une sirène bloquée.
« Mettez-moi toute cette quincaillerie au stérilisateur, reprit Albertson. Tout de suite.
- Oui, docteur. »
L’infirmière chef commença à rassembler les instruments , respirant fort, manifestement encore sous le choc, mais se contrôlant néanmoins.
Le Dr Pritchard paraissait ne rien avoir remarqué de toute cette agitation. Il regardait, avec une attention qui confinait à l’extase, l’ouverture qui venait d’être pratiquée dans le crâne de Thad Beaumont.
« Incroyable, murmurait-il. Tout simplement incroyable. En voilà une qui va rester dans les annales. Si je ne voyais pas ça de mes propres yeux… »
Le sifflement du stérilisateur parut le tirer de sa transe et il tourna les yeux vers le Dr Albertson.
« Aspiration ! » ordonna-t-il d’un ton sec. Il regarda l’infirmière. « Et vous, qu’est-ce que vous fabriquez, bon sang ? Les mots croisés du Sunday Times ? Bougez un peu votre cul avec ces trucs ! »
Elle se précipita, alignant les instruments sur un nouveau plateau.
« Branchez-moi l’aspiration, Lester », ordonna Pritchard à Albertson. « Tout de suite. Et je vais vous montrer quelque chose qu’on ne voit pas souvent, même dans les foires aux monstres. »
Albertson fit rouler l’appareil de pompage, ignorant l’infirmière chef qui recula vivement pour se sortir de son chemin, tout en gardant, adroite, les instruments en équilibre.
Pritchard regarda l’anesthésiste.
« Donner-moi un bon pouls, mon vieux. Un pouls régulier, c’est tout ce que je demande.
- Un poil au dessus de soixante-huit, docteur. Régulier, comme une horloge.
- D’après sa mère, c’est le prochain William Shakespeare que nous avons là, mon vieux, alors garde-le-moi comme ça. Aspirez, aspirez, Lester – et n’allez pas le chatouiller avec votre foutu bidule ! »
Albertson appliqua l’embout d’aspiration et évacua le sang. Des appareils de contrôle, derrière eux, provenaient des bip-bip réguliers, monotones et rassurants. Puis ce fut sa propre respiration que ravala soudain le chirurgien-assistant. Impression brutale d’avoir reçu un bon coup de poing à l’estomac.
« Oh, mon Dieu ! Oh, Seigneur Jésus ! » s’exclama-t-il, reculant tout d’abord pour se rapprocher de nouveau, l’instant suivant. Au dessus de son masque, derrière ses lunettes à monture d’écaille, la curiosité faisait briller ses yeux , ronds de stupéfaction. « Mais qu’est-ce que c’est que ça ?
- Il me semble que ça se voit, non ? répondit Pritchard. Simplement, il faut une ou deux secondes pour s’y habituer. J’avais lu ça dans la littérature, mais je n’aurais jamais pensé en voir une moi-même. »
La cervelle de Thad Beaumont était de la couleur d’une conque, côté extérieur : un gris moyen très légèrement teinté de rose.
En saillie sur la surface lisse de la dure-mère, on voyait un œil humain unique, aveugle et mal formé. Le cerveau pulsait légèrement et l’œil avec. On aurait dit qu’il essayait de cligner vers eux. C’était ce détail –cette impression de clignement d’œil – qui avait fait fuir l’infirmière assistante de la salle d’op.
« Seigneur Jésus, mais qu’est ce que c’est ? » répéta Albertson comme s’il n’avait pas entendu Pritchard .
« Rien, répondit ce dernier. Il a pu faire à un moment donné partie d’un être humain vivant et respirant. Mais maintenant, ce n’est rien. Sinon un bel emmerdement. Un emmerdement dont on peut venir à bout, cependant. »
Le Dr Loring, l’anesthésiste, demanda :
« Je peux regarder, docteur Pritchard ?
- Toujours régulier ?
- Oui
- Aors venez. Vous aurez quelque chose à raconter à vos petits enfant plus tard. Mais faites vite. »
Pendant que Loring regardait, Pritchard se tourna vers Albertson.
« Il me faut la Negli. Je vais ouvrir encore un peu. Ensuite nous sonderons. Je ne sais pas si je pourrai tout sortir, mais je sortirai tout ce que je pourrai, en tout cas. »
Lester Albertson, tenant maintenant le rôle de l’infirmière assistante, fit tomber la sonde fraîchement stérilisée dans la main gantée de Pritchard, lorsque celui-ci la lui demanda. Le chirurgien – qui fredonnait doucement le thème de Bonanza au rythme de sa respiration – travailla rapidement sur la plaie et presque sans effort, sans se servir ou presque du petit miroir type dentiste monté sur l’instrument. Il avançait essentiellement au toucher. Albertson déclara plus tard n’avoir jamais assisté à un numéro aussi stupéfiant de chirurgie « à l’instinct » de toute sa vie.
Outre l’œil, ils trouvèrent une partie de narine, trois ongles et deux dents. L’une des dents comportait une petite carie. L’œil continua de pulser et d’essayer de cligner jusqu’à l’instant où Pritchard, à l’aide du scalpel aiguille, le creva avant de l’exciser. Toute l’opération, du premier sondage à l’excision finale, prit seulement vingt sept minutes. Cinq morceaux de tissus humains étaient tombés avec un bruit humide dans le récipient en acier Inox, sur le plateau Ross, à côté du crâne rasé de Thad.
« je pense que c’est bon », dit finalement Pritchard. « On dirait bien que tous les tissus étrangers étaient reliés par des ganglions rudimentaires. Même s’il en reste, j’estime que nous avons de bonnes chances de les avoir tués.
« mais… comment est-ce possible, puisque le gamin est encore vivant ? Je veux dire… tout ça fait partie de lui, non ? » demanda Loring, stupéfait.
Le chirurgien lui indiqua le plateau. « Nous avons trouvé un œil ; quelques dents et une poignée d’ongles dans la tête de ce gosse, et vous croyez que ça fait partie de lui ? Manquerait-il des ongles à ses doigts par hasard , Vous voulez vérifier ?
« Mais même un cancer est juste une partie des propres tissus du… »
« Il ne s’agit pas d’un cancer », répondit patiemment Pritchard. Ses mains continuaient à aller et venir tandis qu’il parlait. « Dans bien des accouchements où la mère ne donne naissance qu’à un seul enfant, celui-ci a en fait commencé par avoir un jumeau, mon vieux. Ca concerne peut-être jusqu’à dix pour cent des naissances. Qu’arrive-t-il à l’autre fœtus ? Le plus fort absorbe le plus faible. »
« Absorbe ? Vous voulez dire qu’il le mange ? » demanda Loring, soudain légèrement verdâtre. « Etes-vous en train de nous parler de cannibalisme in utero ? »
« Appelez cela comme vous voulez. Ca se produit relativement souvent. Si jamais ils arrivent à mettre au point ce système de sonargramme dont ils n’arrêtent pas de nous bassiner aux conférences médicales, on pourra peut-être connaître la fréquence exacte. Mais peu importe cette fréquence exacte : ce que nous avons vu aujourd’hui est infiniment plus rare. Une partie du jumeau de ce garçon n’a pas été absorbée. Elle a fini par se retrouver dans le lobe préfrontal. Elle aurait tout aussi bien pu atterrir dans les intestins, la rate, la moelle épinière , n’importe où. D’habitude, les seuls médecins qui voient ce genre de trucs sont le anatomo pathologistes – au cours des autopsies -, et je ne connais aucun cas où les tissus étrangers étaient la cause de la mort.
« Mais alors, qu’est-ce qui s’est passé ici ? » demanda Albertson.
« Quelque chose a réactivé cette masse de tissus, dont la taille devait être microscopique il y a encore un an. L’horloge de croissance du jumeau absorbé, qui aurait dû s’arrêter pour toujours au moins un mois avant l’accouchement de Mme Beaumont, s’est remise en route pour une raison ou une autre… et la foutue machine était bougrement bien remontée. Il n’y a aucun mystère sur ce qui s’est passé. La pression intracrânienne suffit à elle seule à expliquer les maux de tête du gamin et ses convulsions. »
« Oui » dit doucement Loring. « mais pourquoi l’horloge s’est-elle remise en route ? »
Pritchard secoua la tête.
« Si je suis encore en train de faire des choses un peu plus compliquées que mon entraînement au golf dans trente ans, alors reposez-moi la question ? J’aurai peut-être la réponse. Tout ce que je sais, pour le moment, c’est que je viens de localiser et d’exciser une variété très rare et très spéciale de tumeur. Une tumeur bénigne. Et, tout ce que les parents doivent savoir. A côté du père de ce gosse, l’homme de Neandertal a l’air du Prince Charmant. Je me vois mal en train de lui expliquer que j’ai pratiqué un avortement sur son fiston de onze ans. Bon. On ferme maintenant Lester. »
Et, comme une pensée qui lui revenait après coup, il ajouta d’un ton badin, à l’intention de l’infirmière chef :
« Je veux que cette stupide conne qui s’est tirée tout à l’heure soit virée. N’oubliez pas de faire une note, s’il vous plait »
« Oui, docteur. »
Thad Beaumont quitta l’hôpital neuf jours après l’intervention. Le côté gauche de son corps resta d’une déprimante faiblesse pendant encore presque six mois et de temps en temps, quand il était très fatigué, il lui arrivait de voir des éclairs briller devant ses yeux, selon des motifs réguliers.
Sa mère lui avait acheté une machine à écrire, une vieille Remington 32, comme cadeau de convalescence, et ces éclairs se produisaient le plus souvent quand il restait courbé dessus avant d’aller se coucher, se bagarrant pour trouver la bonne manière d’exprimer quelque chose, ou pour imaginer ce qui allait arriver dans la suite de l’histoire qu’il écrivait. Mais finalement, cela disparut aussi.
Les surnaturels pépiements d’oiseaux fantômes – le bruit de bataillons de moineaux prenant leur vol – ne se reproduisirent plus après l’opération.
Il continua d’écrire, prenant confiance en lui et affinant son style encore incertain ; il vendit sa première histoire – à American Teen - six ans après le début de sa vie réelle. Après cela, il ne regarda plus jamais derrière lui.
Ses parents comme lui-même savaient simplement qu’on lui avait retiré une petite tumeur bénigne du lobe frontal, au cours de l’automne de ses onze ans. Quand il y pensait (ce qui lui arrivait de plus en plus rarement au fur et à mesure que passaient les années), il se disait qu’il avait eu beaucoup de chance de s’en tirer.
On ne pouvait en dire autant de tous les patients qui subissaient une intervention chirurgicale au cerveau, en ces temps primitifs...
LA PEAU SUR LES OSCAPRICE  (24.01.2006 à 20:17)
« Maigris », murmure le vieux Tsigane au nez décomposé lorsque William Halleck et sa femme Heidi émergent du palais de justice. Juste ces deux syllabes : « Maigris » Il les souffle au visage de Halleck en même temps qu’un flot d’haleine fétide et douceâtre, et avant que Halleck ait pu esquisser un mouvement de recul il lève le bras et lui caresse la joue du bout de son index déformé par l’arthrite. La bouche du vieillard se fend, découvrant des gencives hérissées de quelques rares chicots. Ses chicots sont de guingois, noirâtres, verdissant à la base. Une langue reptilienne les contourne puis glisse à l’extérieur pour humecter ses lèvres distendues par un rictus haineux.
Maigris…

Stephen King (Richard Bachman)
CARRIECAPRICE  (29.01.2006 à 12:21)
…Les filles s’arrêtèrent, comprenant que le stade de la fission, de l’explosion était atteint. Ce fut à ce point que, rétrospectivement, certaines d’entre elles ressentirent, affirmèrent-elles, une vive stupéfaction. Et pourtant, des années s’étaient écoulées, des années passées à mettre en portefeuille le lit de Carrie au camps de Jeunesse Chrétienne et j’ai trouvé ce billet doux de Carrie à Flash Bobby Pickett on va le recopier et le faire circuler, ou cachons-lui sa culotte ou mettons ce serpent dans sa chaussure ou faisons-lui boire la tasse à la piscine ; Carrie, toujours à la traîne pendant les balades à vélo, traitée une année de méduse et la suivant de face de pet, exhalant toujours des relents de sueur, incapable de suivre les autres ; se piquant aux orties en urinant dans les buissons à la grande joie des autres (hé, gratte-cul, ça te picote, tes fesses ?) ; Billy Peanut qui lui étala du beurre de cacahuètes dans les cheveux le jour où elle s’était endormie à l’étude ; les pinçons, les jambes tendues pour lui faire des croche-pieds dans les couloirs de l’école, les livres jetés à bas de son bureau, la carte postale obscène glissée dans son sac ; et Carrie au pique-nique paroissial s’agenouillant avec maladresse pour prier et la couture de sa vieille jupe de coton qui craque le long de sa fermeture éclair avec un sifflement de ventilateur ; Carrie qui manque invariablement la balle, même à la balle au camp, qui tombe à plat ventre en classe de danse moderne et se casse une dent, qui se prend dans le filet en jouant au volley-ball ; dont les bas ont toujours des mailles filées ou prêtes à filer, dont les blouses sont toujours auréolées de sueur aux aisselles ; et même le jour où Chris Hargensen lui a téléphoné de la friterie Kelly dans le bas de la ville pour lui demander si elle savait que Carrie s’écrivait C.A.C.A.R.I.E. Soudain, cette accumulation de brimades cristallise et la masse critique est atteinte. L’ultime degré de la méchanceté, de la vacherie dans le coup bas si longtemps recherchée, est trouvé. La Fission…

Stephen King
LES YEUX DU DRAGONCAPRICE  (31.01.2006 à 20:34)
… En ces temps lointains, quand une reine donnait naissance à un enfant on appelait une sage-femme auprès d’elle. Les médecins étaient tous des hommes, et aucun homme n’était autorisé à assister à l’accouchement. C’était Anna Crookbrows de la troisième allée Sud qui avait aidé Sasha lors de la naissance de Peter. Elle fut naturellement rappelée lors de celle de Thomas. Anna avait passé la cinquantaine et était déjà veuve à l’époque du second accouchement. Elle avait un fils qui avait contracté la maladie du tremblement à l’âge de vingt ans, mal qui tuait infailliblement ses victimes après quelques années de souffrance.
Elle aimait beaucoup son fils, et, après que toutes ses tentatives eurent échoué, elle se résigna à aller voir Flagg. Cela s’était passé dix ans plus tôt, alors qu’aucun héritier de la couronne n’était encore né et que Roland était toujours célibataire. Le magicien la reçut dans son antre du sous-sol, tout près du donjon, et, durant l’entretient, la femme, mal à l’aise, entendait les cris désespérés de ceux qui avaient été privés de la lumière du jour pour des années et des années. Si le donjon était proche, la chambre de torture ne devait pas être bien loin, songea-t-elle. Les appartements de Flagg n’avaient rien non plus pour la réconforter. D’étranges dessins à la craie multicolores ornaient le sol. Si elle clignait des eux, ils semblaient changer de forme. Dans une cage accrochée à une longue paire de menottes noires, un perroquet à deux têtes croassait et se parlait tout seul, une tête formulant les demandes, l’autre les réponses. Des livres moisis la regardaient sévèrement. Les araignées tissaient leur toile dans les coins sombres. D’étranges effluves chimiques émanaient du laboratoire. Malgré tout, elle réussit à raconter son histoire et attendit, malade d’anxiété.
« Je peux guérir ton fils » lui répondit finalement Flagg
La joie d’Anna Crookbrows transforma momentanément la laideur de son visage en une sorte de beauté.
« Seigneur » dit elle. Elle était incapable de prononcer toute autre parole. « Oh Seigneur !! » répéta-t-elle.
Mais, dans l’ombre de son capuchon, le visage de Flagg restait distant et pensif. De nouveau, la femme eut peur.
« Qu’es-tu prête à payer pour ce miracle ? »
« Tout ce que vous voudrez, dit-elle sincèrement. Oh Flagg, mon Seigneur et Maître, tout ce que vous voudrez »
« Je te demande un service, voudras-tu me le rendre ? »
« Avec joie ! »
« Je ne sais pas encore lequel, mais quand l’heure viendra, je te le dirai. »

Elle était tombée à genoux devant lui et il se pencha vers elle. Son capuchon retomba en arrière. Effectivement, il avait un visage épouvantable, un visage de cadavre, tout blanc avec des trous à l’endroit des yeux.
« Et si jamais tu refuses, femme… »
« Jamais, jamais, Seigneur ! Je ne refuserai pas ! Je ne refuserai pas ! Je le jure sur le nom de mon cher mari !! »
« Alors, tout est parfait. Amène-moi ton fils demain à la tombée de la nuit. »

Le lendemain, elle conduisit donc son fils auprès du magicien. Il tremblait de tous ses membres et de la bave lui coulait sur le menton. Flagg donna une potion noire, couleur de prune, dans un verre.
« Fais le boire, dit-il. Cela va lui brûler la langue, mais fais-le boire jusqu’à la dernière goutte. Ensuite, emmène cet idiot hors de ma vue.
Anna murmura quelques mots à son fils. Pendant un instant, le garçon essaya de hocher la tête et se mit à trembler encore plus. Il avala tout le liquide, puis se courba en deux, hurlant de douleur.
« Fais le sortir, ordonna Flagg »
« Oui, fais-le sortir ! » cria l’une des têtes du perroquet.
« Fais-le sortir, il est interdit de crier en ces lieux ! » dit l’autre tête.
Elle l’emmena à la maison, sûre que Flagg l’avait tué. Mais le lendemain, la maladie du tremblement avait totalement quitté son fils et il allait bien.
Les années s’écoulèrent. Quand Sasha ressentit les premières douleurs, Flagg fit appeler la sage-femme et lui murmura quelque chose à l’oreille. Ils étaient seuls dans ses appartements, mais, même ainsi, mieux valait ne pas prononcer ce genre de choses à voix haute.
Soudain, Anna Crookbrows devint livide, mais elle se souvint des mots de Flagg : Si tu refuses femme
Finalement, le roi aurait ses deux enfants ; elle, n’en avait qu’un. Et si le roi voulait se remarier pour en avoir d’autres, qu’il le fasse. A Delain, ce n’étaient pas les femmes qui manquaient.
Elle se rendit donc auprès de Sasha, lui parla d’un ton encourageant, et, au moment crucial, un petit couteau se mit à scintiller dans sa main. Personne ne la vit faire la petite coupure. Un instant plus tard, Anna cria : « Poussez, ma Reine, poussez ! Le bébé arrive ! » Sasha poussa. Thomas sortit aussi aisément qu’un enfant qui glisse sur un toboggan. Mais le sang de Sasha inonda les draps. Dix minutes plus tard, Thomas était né et sa mère était morte.
C’est pourquoi Flagg ne se souciait guère d’un sujet aussi trivial qu’une maison de poupée. Ce qui importait, c’était que Roland se faisait vieux, qu’il n’y avait plus de reine pour contrecarrer ses vues et que, à présent, il y avait deux fils entre lesquels choisir et non plus un seul. Peter pourrait être écarté si jamais il ne correspondait pas aux vœux de Flagg. Ce n’était qu’un enfant et il ne savait pas encore se défendre.
Je vous ai déjà dit que Roland n’avait jamais aussi longuement et aussi soigneusement réfléchi pendant toute la durée de son règne qu’il ne l’avait fait sur ce problème : autoriser ou non son fils à jouer avec la maison de poupée de Sasha, si brillamment sculptée par le grand Ellender. Je vous ai dit aussi que sa décision s’opposait aux désirs de Flagg. Je vous ai également précisé que, en fait, Flagg n’y attachait pas beaucoup d’importance.
Etait-ce vraiment le cas ? Vous en jugerez par vous-même quand vous m’aurez écouté jusqu’au bout.

Stephen King

passagehirogirl  (01.02.2006 à 19:21)
J'aime beaucoup ce passage! J'ai l'impression de l'avoir déjà lu... :) en tout cas on s'y attend trop!
Les yeux du dragonCAPRICE  (02.02.2006 à 21:20)
Lis-le ma belle !! C’est un conte de fées écrit à l’intention de sa fille Naomi ;-)
PEUR BLEUECAPRICE  (08.03.2006 à 17:26)

Février

C’est la nuit de la Saint-Valentin. La lune est pleine, et ses rayons pénètrent à flots par la fenêtre, baignant la chambre d’une lumière froide et bleue. Allongée dans son étroit lit de pucelle, Stella Randolph rêve d’amour.
Ah ! l’amour, l’amour ! songe-t-elle. L’amour, ce serait…
Cette année, Stella Randolph, qui préside aux destinées de la seule mercerie-bonneterie de Tarkers Mills, a reçu vingt cartes. Une de Paul Newmann, une de Robert Redford, une de John Travolta… Une, même, d’Ace Frehley, le guitariste du groupe Kiss. Elles sont posées, ouvertes, sur le bureau, à l’autre extrémité de sa chambre, et la lune y accroche de vagues reflets bleuâtres. Cette année, comme toutes les années précédentes, Stella Randolph s’est expédié ces cartes à elle-même.
L’amour, ce serait un baiser aux premières lueurs de l’aube… ou bien cet ultime baiser, gage d’amour éternel, par lequel se concluent tous les romans de la série Harlequin… L’amour, ce seraient des roses dans le soleil couchant…
Oh bien sûr, on rit d’elle à Tarkers Mills. Les mioches lui lancent des quolibets sournois et ricanent à al dérobée sur son passage ; parfois même lorsqu’ils sont à distance respectueuse et que le constable Neary n’est nulle part en vue, ils vont jusqu’à psalmodier : « Bidon-bedon-grosse-dondon ! » de leurs petites voix flûtées et moqueuses. Pourtant, Stella sait ce qu’est l’amour, elle sait ce qu’est la lune. Son commerce dépérit peu à peu, et c’est vrai qu’elle a quelques kilos de trop, mais par cette nuit propice aux rêveries, avec la poignante clarté de la lune qui ruisselle des fenêtres ourlées de givre, il lui semble que l’amour est encore possible – l’amour, et celui qui un jour viendra, apportant avec lui une entêtante odeur d’été…
L’amour, ce serait le contact rude d’une joue d’homme râpeuse, un peu piquante…
Tout à coup, il y a un léger crissement à la vitre.
Stella se dresse sur les coudes, et le couvre-lit en piqué glisse de son imposante poitrine. Une silhouette sombre, aux contours vagues, mais indéniablement masculins, s’encadre dans la fenêtre, masquant la clarté lunaire. Je rêve ! se dit Stella. Eh bien, si c’est un rêve, je vais le laisser entrer. Je vais lui ouvrir ma fenêtre, puis je lui ouvrirai mes cuisses… Et qu’on ne vienne pas me dire que c’est obscène : rien n’est plus beau, plus pur, plus parfait ! Ah l’amour ce serait d’être ouverte toute grande pour le laisser venir en moi !
Elle se lève, persuadée qu’il s’agit d’un rêve, cari il y a bel et bien un homme embusqué derrière la vitre et cet homme, elle l’a reconnu sans peine, vu qu’elle le croise pratiquement chaque jour dans la rue. Cet homme, c’est…
(L’amour ! L’amour vient ! L’amour est venu !)
Mais à l’instant où ses doigts boudinés se posent sur le froid châssis de la fenêtre à guillotine, Stella s’aperçoit que c’est une bête, et non un homme, qui se tient de l’autre côté : un énorme loup hirsute, les pattes de devant appuyées sur le bord extérieur de la fenêtre, les pattes de derrière enfoncées jusqu’à la croupe dans l’épaisse couche de neige qui s’est amoncelée contre l’un des murs de sa petite maison isolée aux confins de la ville.
C’est la Saint-Valentin et j’aurai de l’amour ! s’obstine Stella Randolph dans son for intérieur. Même en rêve, on peut être victime d’une illusion d’optique. C’est un homme, son homme, celui qu’elle attend depuis si longtemps, et il est d’une diabolique beauté.
(Diabolique, oh oui, l’amour ce serait d’avoir le diable au corps…)
Il est enfin venu par cette nuit tout irradiée de lune.
Il est venu, il va la prendre, il va la…
Elle soulève brutalement le châssis, et le souffle glacial qui plaque sur ses cuisses le tissu arachnéen de sa chemise de nuit de nylon bleu pâle lui dit qu’il ne s’agit pas d’un rêve. Son Prince Charmant n’est plus là, et avec une sensation d’horreur vertigineuse elle comprend que c’est son imagination qui lui a joué un tour. Frissonnante, elle recule d’un pas mal assuré. Le loup bondit, atterrit sur le plancher de la chambre avec une extraordinaire légèreté et s’ébroue, éclaboussant la pénombre d’une poudre de neige impalpable.
L’amour, toujours ! L’amour, ce serait… Ce serait comme… comme un grand cri…
Elle se rappelle soudain Arnie Westrum, qu’on a retrouvé égorgé dans une cabane en bord de voie il y a tout juste un mois. Mais il est trop tard, beaucoup trop tard…
Le loup s’avance vers elle sans se hâter. Ses yeux jaunes lancent des lueurs de froide convoitise. Pas à pas, Stella Randolph recule vers son étroit lit de pucelle ; l’arrière de ses genoux dodus heurte la barre métallique du cadre et elle tombe à la renverse sur le couvre-lit en piqué.
Le sillon d’argent de la lune divise en deux, comme une raie bien nette, le pelage épais de la bête.
La brise qui s’insinue par la fenêtre ouverte fait trembler imperceptiblement les cartes de la Saint-Valentin entassées sur le bureau. L’une d’elles se détache de la pile et tombe en tournoyant paresseusement sur elle-même.
Le loup pose ses deux pattes sur le lit, une de chaque côté dur corps étendu de Stella. Elle sent son haleine sur son visage, une haleine brûlante, mais dont la chaleur n’est pas si déplaisante que ça. Les yeux jaunes du monstre plongent dans les siens.
« Mon chéri… » souffle-t-elle en fermant les paupières.
Il s’abat sur elle.
L’amour, ce serait comme une mort.

Stephen King

ROSE MADERCAPRICE  (08.03.2006 à 17:28)
PROLOGUE
Baisers sinistres


Assise dans le coin, elle essaie de respirer, laborieusement, un air qui semble s’être brusquement raréfié un faible woup-woup : elle sait que c’est de l’air qui descend et remonte dans sa gorge en une série de petits hoquets fiévreux, mais cela ne change rien, fondamentalement, à ce qu’elle ressent, à cette impression de se noyer dans un angle de la pièce avec sous les yeux les restes déchiquetés du livre de poche qu’elle lisait à l’arrivée de son mari.
Non pas qu’elle y attache beaucoup d’importance. La douleur est trop forte pour qu’elle se soucie de problèmes mineurs comme respirer, ou du fait qu’il n’y ait plus d’air, dirait-on, à respirer. La douleur l’a engloutie comme la baleine aurait englouti Jonas, le saint déserteur, d’après ce qu’on raconte. Elle pulse comme un soleil empoisonné qui brûlerait au plus profond d’elle-même, en un point de son corps d’où, jusqu’à ce soir, ne montait que la satisfaction paisible d’une victoire chèrement acquise.
Elle ne se souvient pas d’avoir jamais autant souffert, pas même lorsque, à treize ans, voulant éviter un nid-de-poule, elle était tombée de bicyclette au milieu de la rue : son crâne avait violemment heurté la chaussée et la blessure nécessité la pose de pas moins de onze points de suture. Elle se rappelle seulement une décharge aveuglante de douleur suivie d’une impression surprenante de nuit étoilée – un bref évanouissement, en réalité, mais pas ce supplice. Ce supplice atroce. La main qu’elle pose sur son ventre enregistre la présence d’une chair qui n’est plus du tout une chair ; c’est comme si on lui avait décousu l’abdomen pour remplacer le bébé par un caillou.
O mon Dieu, je vous en prie, pense-t-elle. Je vous en prie, faites que le bébé aille bien !
Mais voilà qu’elle se rend justement compte, alors que sa respiration commence à devenir plus facile, que le bébé ne va pas bien – l’autre, en tout cas, s’est arrangé pour qu’il en soit ainsi. Quand on est enceinte de quatre mois et que le bébé est davantage partie intégrante de votre corps qu’il n’existe par lui-même, et quand on est assise dans un coin, des mèches de cheveux collées aux joues par la sueur, le ventre comme une pierre brûlante agitée de pulsations…
Quelque chose de chaud et humide dépose de sinistre petits baisers gluants sur l’intérieurs de ses cuisses.
« Non, murmure-t-elle, non…O mon Dieu, mon Dieu, non !! O mon Dieu, mon Dieu, non !! »
Faites que ce soit de la sueur… Faites que ce soit de la sueur…Ou alors, je me suis fait pipi dessus. Oui, c’est probablement ça. J’ai eu tellement mal quand il m’a tapé dessus, la troisième fois, que je me suis fait pipi dessus sans m’en rendre compte. Oui, c’est ça.
Sauf que ce n’est ni de la sueur ni de l’urine, mais du sang. Tandis qu’elle est assise là, dans l’angle de la salle de séjour, les yeux fixés sur un livre de poche déchiré dont une partie se trouve sur le canapé et l’autre sous la table basse, son utérus s’apprête à vomir le bébé qu’il a jusqu’ici porté sans se plaindre une seule fois.
« Non, gémit-elle. O mon Dieu, dites-moi que ce n’est pas vrai. »
Elle voit l’ombre de son mari, aussi déformée et étirée en longueur qu’un épouvantail ou l’ombre d’un pendu, qui danse et se déplace sur le mur de l’arcade, entre séjour et cuisine. Elle voit une ombre de téléphone appuyée à une ombre d’oreille, ainsi que le cordon tirebouchonné. Elle voit même l’ombre de ses doigts qui démêlent les nœuds, maintiennent le fil ainsi un instant, puis le laissent se réenrouler sur lui-même –un peu comme une mauvaise habitude dont on n’arrive pas à se défaire.
La première pensée qui lui vient à l’esprit est qu’il appelle la police. Ridicule, évidemment : la police, c’est lui.
« Oui, dit-il, c’est une urgence. Je vous fiche mon billet que c’en est une ! Elle est enceinte ! » Il écoute, sans cesser de tripoter machinalement le cordon, et quand il reprend la parole, c’est d’un ton sec. Cette simple pointe d’irritation dans la voix de son mari suffit à la submerger de terreur, et sa bouche se remplit d’un goût de fer. Qui donc se permet de le mettre en colère, de le contredire ? Qui est assez fou pour s’y essayer ? Seulement quelqu’un qui ne le connaît pas bien, bien entendu ; quelqu’un qui ne le connaît pas comme elle, elle le connaît. « Evidemment que je ne vais pas la bouger. Vous me prenez pour un idiot ? »
Ses doigts se glissent sous l’ourlet de sa robe et remontent jusqu’au coton imbibé et chaud de sa culotte. Je vous en prie, pense-t-elle. Combien de fois a-t-elle prononcé cette supplication dans sa tête depuis qu’il lui a arraché le livre des mains ? Elle l’ignore, mais voilé que ça recommence. Je vous en prie, faites que le liquide soit clair sur mon doigt, mon Dieu, je vous en prie, faites qu’il soit clair.
Elle retire la main de dessous sa robe et l’examine. Elle a le bout des doits rouge de sang et, pendant qu’elle les regarde, une crampe monstrueuse la cisaille comme une lame ébréchée. Elle doit serrer les mâchoires de toutes ses forces pour étouffer un cri.
« Laissez tomber toutes ces conneries et ramenez-vous ici !! Foncez !! » rugit-t-il, raccrochant aussitôt avec brutalité.
L’ombre grandit et vacille sur le mur, et il est déjà dans l’encadrement de l’arcade et la regarde, de son beau visage empourpré. Les yeux, dans ce visage, sont aussi inexpressifs que des tessons de bouteille qui scintilleraient sur le bas-côté d’une route de campagne.
« Regardez-moi ça, dit-il, joignant brièvement les mains et les laissant retomber le long de son corps. Regardez ce gâchis. »
Elle tend la main pour lui montrer l’extrémité ensanglantée de ses doigts – ce qu’elle peut faire de plus explicite en guise d’accusation.
« Je sais », dit-il, comme si le fait de savoir suffisait à tout expliquer, à replacer toute cette affaire dans un contexte cohérent et rationnel. Il tourne la tête et étudie un moment le livre de poche démembré. Il ramasse la moitié posée sur le canapé, puis se baisse pour attraper l’autre, sous la table basse. Il se redresse et elle aperçoit la couverture, sur laquelle on voit une femme en blouse blanche de paysanne à la proue d’un bateau. Le vent lui repousse violemment les cheveux en arrière, dévoilant ses épaules laiteuses. Le titre, Le Voyage de Misery, figure en lettres rouges métallisées.
« C’est ça, le problème », reprend-il en agitant les restes du livre comme on brandit un journal roulé en direction d’un chiot qui vient de faire pipi par terre. « Ces conneries. Combien de fois t’ai-je déjà dit ce que j’en pensais ? »
Jamais, telle est la réponse. Elle aurait pu tout aussi bien se retrouver dans ce coin de la pièce, à faire une fausse couche, s’il l’avait surprise, à son retour, en train de regarder les informations à la télé, ou de recoudre un bouton à l’une de ses chemises, ou simplement de faire une petite sieste sur le canapé. Il a des embêtements, en ce moment. Une femme du nom de Wendy Yarrow en est à l’origine et, dans ces cas-là, Norman ne trouve rien de mieux que de s’en défausser sur les autres. Combien de fois t’ai-je dit ce que je pensais de cette connerie ? aurait-il crié, quelle que fût la connerie. Puis, avant de commencer à jouer des poings : Va falloir qu’on ait une petite discussion, mon chou, une petite discussion entre quat’z’yeux .
« Tu ne comprends pas ? dit-elle dans un souffle. Je suis en train de perdre le bébé ! »
Chose incroyable, il sourit. « Tu pourras en avoir un autre. » Comme s’il essayait de réconforter un enfant qui vient de faire tomber sa boule de crème glacée. Puis il retourne dans la cuisine, sans aucun doute pour jeter le livre déchiré à la poubelle.
Espèce de salopard, pense-t-elle sans même savoir qu’elle le pense. Les crampes reviennent. Non pas une seule, cette foi, mais en vagues successives, elle grouillent en elle comme de terrifiants essaims d’insectes. Elle rejette la tête en arrière contre l’angle des cloisons, de toutes ses forces, et gémit. Si tu savais comme je te hais, espèce de salopard !
Il revient dans la pièce, se dirige vers elle. Elle se met à pédaler comme pour s’enfoncer dans le mur et le regarde avec des yeux où on ne lit que peur et affolement. Un instant, elle a la certitude qu’il va la tuer, cette fois, pas seulement lui faire mal, pas seulement la priver du bébé qu’elle désirait depuis si longtemps, si désespérément, non, mais vraiment la tuer. Il y a quelque chose d’inhumain dans la manière dont il l’étudie tandis qu’il s’avance vers elle, la tête baissée, bras ballants, les longs muscles de ses cuisses fléchissant tour à tour. Avant que les nouvelles générations n’appellent les hommes comme don mari des « flics », on employait un autre terme pour les qualifier et c’est celui qui lui vient à l’esprit lorsqu’elle le voit traverser la pièce la tête baissée, ses poings se balançant au bout de ses bras comme deux pendules, car c’est exactement de ça qu’il a l’air : d’un taureau.
Elle gémit, secoue la tête, pédale comme une folle. Elle perd l’une de ses chaussures. Ses douleurs reprennent, les crampes s’enfoncent dans son ventre comme de vieilles ancres aux becs rongés de rouille, le sang s’est remis à couler, mais elle est incapable de s’arrêter. Ce qu’elle voit en lui quand il est ainsi se réduit à une sorte de terrible absence.
Il la domine de toute sa taille et secoue la tête avec une expression d’indulgence fatiguée. Puis il s’accroupit et passe les bras sous elle. « Je ne vais pas te faire mal, dit-il en s’agenouillant pour pouvoir la soulever, alors arête de faire la dinde. Sauf si tu m’obliges. Je ne t’ai jamais battue sans que tu m’y obliges, tu le sais bien.
« Je saigne », murmure-t-elle, se souvenant de ce qu’il a dit à son correspondant, au téléphone, qu’il ne la déplacerait pas, évidemment qu’il ne la déplacerait pas.
« Ouais, je sais », répond-il. Sans marquer d’intérêt et encore moins de compassion. Il regarde autour de lui, pour décider où a eu lieu l’accident ; elle suit le cours de ses réflexions aussi sûrement qui si elle était dans sa tête. « Pas de problème, ça va s’arrêter. Ils vont te l’arrêter »
Oui, mais pourrant-ils arrêter la fausse couche ? s’écrie-t-elle –sans penser que, si elle peut lire dans ses pensées, il peut en faire autant de son côté, ni remarquer le regard attentif et totalement dépourvu de tendresse qu’il lui adresse. Et une fois de plus, elle ne s’autorise même pas à énoncer clairement ce qui lui est venu à l’esprit : Je te hais. Te hais.
Il la transporte d’un pas rapide jusqu’à l’escalier, s’agenouille et la dépose au pied de la première marche.
« Tu es bien, comme ça ? » demande-t-il avec sollicitude.
Elle ferme les yeux. Elle se sent incapable de le regarder. Pas tout de suite. Elle deviendrait folle.
« Bien », enchaîne-t-il comme si elle lui avait répondu. Et lorsqu’elle ouvre enfin les yeux, elle voit l’expression qu’il arbore parfois – plus vide que le vide. Comme si son esprit s’était envolé dans quelque royaume magique secret, laissant son corps derrière lui.
Si j’avais un couteau, je serais capable de le frapper, pense-t-elle, idées qu’une fois de plus elle ne s’autorise pas à écouter, encore moins à approfondir. Ce n’est qu’un écho profond, un reflet de la folie de son mari, aussi feutré qu’un bruissement d’ailes de chauve-souris dans une grotte obscure.
Le visage de Norman retrouve brusquement son animation et il se lève, dans un craquement sec de rotules. Il vérifie qu’il n’y a pas de taches sur sa chemise. Parfait. Il regarde l’endroit où elle s’est effondrée. Là, en revanche, il y a du sang. Quelques gouttes, deux ou trois petites flaques. Elle sent qu’elle ne perd de plus en plus, qu’il coule plus vite, qu’il inonde le milieu de son corps d’une chaleur malsaine, presque avide… comme s’il se précipitait hors de son ventre pour se débarrasser de l’étranger, pour le déloger de son minuscule appartement, d’une bonne vidange. Presque comme si – oh, l’horrible pensée – son sang avait pris le parti de son mari, aussi aberrant que fût ce parti.
Il retourne dans la cuisine et y reste environ cinq minutes. Elle l’écoute qui va et vient alors que se produit la fausse couche, dans un paroxysme de souffrance que se transforme en une sorte de chiasse liquide qu’elle ressent autant qu’elle l’entend. Soudain, elle a l’impression d’être assise dans un bidet rempli d’un liquide chaud et épais. Une sorte de sauce sanguinolente.
L’ombre déformée s’allonge et vacille sur l’arcade, la porte du réfrigérateur s’ouvre et se ferme, puis celle d’un placard (celui qui est sous l’évier, d’après le léger grincement). De l’eau coule dans l’évier et – elle n’en croit pas ses oreilles – il commence à fredonner un air qui est peut-être, pense-t-elle, Quand un homme aime une femme, alors que son bébé s’échappe de son corps et vient souiller le coton rose de sa petite culotte d’un rouge plus profond.
Quand il revient dans la pièce, il tient un sandwich d’une main – il n’a pas encore dîné, évidemment, et il a sans doute faim – et un chiffon humide de l’autre. Il va s’accroupir dans l’angle de la pièce où elle a chancelé à reculons après qu’il lui eut arraché le livre de poche des mains et administré trois coups de poing – Bam, bam, bam, à la revoyure, étranger – et entreprend d’essuyer les taches de sang qu’elle y a laissées ; le gros de l’hémorragie et le reste se trouveront cependant ici, au pied de l’escalier, exactement là où il veut que cela soit.
Il mord dans son sandwich tout en s’activant. Le truc, entre les tranches de pain, lui paraît être les restes de porc qu’elle avait envisagé d’accommoder avec des nouilles pour samedi soir – un plat facile à préparer qu’ils auraient mangé devant la télé, en regardant la fin d’un match de football.
Il regarde le chiffon, qui a pris une couleur légèrement rosée, puis le sol, puis de nouveau le chiffon. Il hoche la tête, prend une énorme bouchée dans le sandwich et se relève. Le temps qu’il revienne de la cuisine, cette fois, elle entend le ululement encore lointain d’une sirène. Probablement l’ambulance qu’il a appelée.
Il traverse la pièce, s’agenouille à côté d’elle et lui prend les mains. Il fronce les sourcils en les sentant aussi froides, et se met à les lui frictionner doucement tout en lui parlant.
« Je suis désolé, dit-il. C’est simplement que… des trucs sont arrivés… cette salope, au motel… » Il s’interrompt, détourne un instant les yeux. Il arbore un sourire étrange, nostalgique. Voyez un peu avec qui j’essaie de m’expliquer, semble dire ce sourire. Voilà où j’en suis rendu. Pfuiiiiii.
« Le bébé, souffle-t-elle, le bébé… »
Il lui serre les mains, il les lui serre au point de lui faire mal.
« Ne t’occupe pas du bébé. Contente-toi de m’écouter. Ils vont arriver d’ici une ou deux minutes. (Oui, l’ambulance est toute proche maintenant, hurlant dans la nuit comme un chien innommable.) Tu descendais l’escalier et tu as raté une marche. Tu es tombée. Tu m’as compris ? »
Elle le regarde et ne répond rien. La douleur qui monte de son ventre a commencé à s’atténuer un peu et, quand il écrase les deux mains, cette fois –encore plus fort -, elle le sent vraiment et pousse un soupir.
« Tu m’as compris ? »
Elle regarde dans son absence de regard et acquiesce. Autour d’elle s’élève maintenant une odeur plate d’eau salée et de cuivre. Plus celle de sauce ensanglantée. Comme si elle était assise dans un bain de produits chimiques qui viendrait de se renverser.
« Bien. Tu sais ce qui t’arrivera si tu dis autre chose ? »
Elle hoche de nouveau la tête.
« Dis-le. Il vaut mieux pour toi que tu le dises. C’est plus sûr. »
« Tu me tueras », souffle-t-elle.
Il acquiesce, l’air satisfait d’un maître qui a réussi à arracher la bonne réponse à un élève peu doué.
« Exact. Et je prendrai mon temps. Avant que j’aie terminé, ce qui s’est passé ce soir te ferait l’effet d’une égratignure. »
Dehors, des éclats de lumière mauve zèbrent l’allée du garage.
Il prend la dernière bouchée de son sandwich et se lève. Il va aller les accueillir à la porte, en mari attentif dont la femme enceinte vient d’avoir un accident malheureux. Mais, avant qu’il ait pu se tourner, elle l’attrape par la manche de sa chemise. Il abaisse les yeux sur elle.
« Pourquoi ? murmure-t-elle. Pourquoi le bébé, Norman ? »
Un instant, apparaît sur son visage une expression à laquelle elle a du mal à croire : on dirait de la peur. Mais pour quelle raison aurait-il peur d’elle ? Ou du bébé ?
« C’était un accident, dit-il. C’est tout, juste un accident. Je n’y suis strictement pour rien. Et t’as intérêt à leur dire exactement ça. Que Dieu te vienne en aide. »
Que Dieu me vienne en aide, pense –t-elle.
Claquements de portières à l’extérieur ; bruits de pas courant vers la maison, cliquetis métalliques et grincements de la civière sur laquelle on la transportera. Il se tourne une fois de plus vers elle, tête baissée, la posture taurine, l’œil opaque.
« Tu auras un autre bébé, que tu garderas, celui-là. Il ira très bien. Une fille. Ou peut-être un gentil petit garçon. Peu importe, hein ? Si c’est un garçon, on lui offrira une tenue de joueur de base-ball. Si c’est une fille… (il a un geste vague)… un bonnet, ou n’importe quoi. Tu verras. Tu auras un autre bébé. » Il sourit, et elle a envie de hurler. Impression de voir un cadavre sourire dans son cercueil. « Si tu fais attention à ce que je te dis, tout ira bien. Mets ça dans ta poche et ton mouchoir par-dessus, mon cœur. »
Sur quoi il ouvre la porte et fait entrer les ambulanciers, leur disant de se dépêcher, qu’elle saigne. Elle ferme les yeux quand ils s’approchent d’elle, par refus de leur laisser voir ce qu’il y a en elle, et fait en sorte que leurs voix lui parviennent de loin.
Ne t’en fais pas, Rose, pas de panique, c’est un détail, rien qu’un bébé, tu pourras en avoir un autre.
Une aiguille s’enfonce dans son bras et on la soulève. Elle garde les yeux fermés et pense : Bon d’accord, très bien. J’imagine que je pourrai avoir un autre bébé. Je peux en avoir un et le mettre hors de portée. Hors de portée de ses mains d’assassin.
Mais le temps passe et peu à peu l’idée de le quitter – sans jamais avoir été clairement envisagée – s’estompe cependant que le sommeil coupe sa conscience du monde de l’éveil ; peu à peu, l’univers se réduit pour elle à celui des rêves dans lequel elle vit, rêves comme ceux qu’elle faisait, petite fille, et dans lesquels elle courait, courait dans une forêt dépourvue de sentiers ou dans un labyrinthe crépusculaire, avec derrière elle le bruit de sabots d’un grand animal, d’une créature démente et redoutable qui ne cesse de se rapprocher et qui finira par la rejoindre, en dépit de ses louvoiements, de ses zigzags, de ses bonds en tous sens.
Le concept de rêve est clair pour l’esprit éveillé, mais il n’a aucun éveil pour le rêveur, pas de monde réel, pas de vision saine des choses ; pour lui n’existe que la maison de fous du sommeil. Rose McClendon Daniels dormit neuf ans de plus dans la folie de son mari.

Stephen King



Stephen Kingcobrate  (31.08.2012 à 10:50)

A lire au moins une fois. Perso., je conseille Cujo. Je n'ai pas encore lu l'oeuvre originale Dead Zone... Ça viendra peut-être un jour... Idée en l'air : renommer ce forum en 'Stephen King', histoire d'en élargir la discussion.

RenomméMisty  (31.08.2012 à 21:40)

Je serais plutôt pour de renommer ce topic parce que le terme Excerptum, personnellement, ça ne parle pas, et je pense que cela attirera plus de monde avec un autre titre.

Changementlolo66350  (01.09.2012 à 13:19)

Suite à vos demandes j'ai donc renommé le topic "Stephen King" comme l'a suggéré cobrate.

Pensez vous que ce titre est plus explicite ou faut-il encore le changé ? Si c'est le cas auriez vous une idée ?

TitreMisty  (01.09.2012 à 19:54)

Je trouve que le titre Stephen King est assez explicite. Il permet de parler de tout ce qui concerne cet auteur, donc à mon avis, c'est bien comme ça.


Havencobrate  (08.12.2012 à 15:07)

Une autre oeuvre de Stephen King a été adaptée en série : Haven (V.F. : Les Mystère de Haven). On y retrouve une actrice secondaire de Brothers & Sisters... Quelqu'un a vu ?

HavenMisty  (08.12.2012 à 18:47)
Message édité : 08.12.2012 à 18:47

J'ai commencé le pilot, mais je n'ai pas pu en voir plus et du coup, je ne sais pas vraiment si la série me plaît ou pas. En tout cas, j'avais moyennement aimé le début du pilot, j'accrochais pas vraiment, mais j'en ai pas vu assez pour vraiment me dire "est-ce que je vais continuer ou pas ?"

Donc faudrait que je retente de regarder, mais je le ferais un peu à reculons ^^

Il me semble que dans le pilot, il y avait Nicole de Boer en guest, qui joue Sarah dans Dead Zone. J'aime beaucoup cette actrice.

Sinon, j'aime bien l'actrice de Brothers and Sisters, Emily Rose et je l'ai trouvé bien dans Haven.

Je ne savais pas que c'était une adaption de Stephen King ^^

Et toi, est-ce que tu as regardé ?


Havencobrate  (09.12.2012 à 16:54)
Message édité : 09.12.2012 à 16:54

Vu que l'actrice principale de Haven, Emily Rose, a une page dans Brothers & Sisters, c'est sur ce forum que j'ai parlé des épisodes vus de la série.

Je savais que le quartier de Dead Zone avait une page sur Stephen King, et je me suis dit que ça serait intéressant qu'une mention à une autre de 'ses' adaptations  figure dans son forum^^. Vu que moi aussi, je ne savais pas qu'une autre oeuvre de Stephen King, en plus de Dead Zone, était devenue une série.... Décidément, c'est un auteur très... télévisuel^^...

édit : ortho

 

HavenMisty  (09.12.2012 à 20:19)

Oui, tu as bien fait de venir en parler ici vu que cela concerne une adaptation de Stephen King et puis, cela nous apprend quelque chose ^^


Under The Domecobrate  (14.01.2013 à 17:39)

Et de ... je ne sais pas combien^^ (au moins trois mais peut-être plus) : vu dans les actu principales qu'une nouvelle série adaptée d'un roman de Stephen King (et produit par Steven Spielberg) allait voir le jour, cet été aux USA : Under The Dome.

Under the DomeMisty  (14.01.2013 à 17:43)

Je n'étais pas au courant de cette adaptation mais le synopsis de la série a l'air intéressant, pourquoi pas. Aucun acteur n'est rattaché au projet pour le moment, mais j'y jeterais sûrement un oeil si j'ai l'occasion.


Under the Domecobrate  (07.11.2013 à 17:25)

Les spectateurs commencent à en parler dans les forums des nouvelles séries en page principale. J'ai zappé sur des épisodes. Pour l'instant, je ne vois rien de neuf. J'ai l'impression de voir du Haven bis.

Mais je me posais une question. J'ai vu une rousse dans la série, journaliste je crois. J'ai déjà vu l'actrice... et je me demande même si ce n'est pas dans Dead Zone ! ... ce ne serait pas celle qui a interprété un amour de Johnny ?

Actrice + Under the DomeMisty  (07.11.2013 à 22:01)

Non, ce n'est pas celle-là. Celle à laquelle tu penses s'appelle Kristen Dalton et dans Under the Dome, c'est Rachelle Lefevre. Mais je comprends que cela t'y a fait penser ^^

Rachelle Lefevre a joué dans Twilight, je l'ai vue dans quelques téléfilms et sinon dans la série Off the Map.

Personnellement, j'ai bien aimé Under the Dome et je pense continuer à regarder. Peut-être que cela ressemble à Haven mais je ne regarde pas encore cette série, donc je ne peux pas dire. En tout cas, Under the Dome me plaît assez, j'ai envie de voir la suite et j'aime bien ce qui s'y passe, comment c'est crée.

Nightmares 'n' DreamscapesCreDn  (17.05.2015 à 19:18)
Message édité : 17.05.2015 à 19:18

Stephen King a écrit des nouvelles qui ont été reproduites en films. J'en avais lu une et elle ne m'avait pas marquée alors qu'en image c'était très chouette. Et puis il y a encore un autre épisode ( j'appelle ces films des épisodes puisque ils forment une saison ) qui vaut le détour aussi.


Autopsy Room 4
: ( synopsis - Une autopsie tout ce qu'il y a de plus banale à une heure bien fatiguante entre collègues assez distraits penchés sur un corps tout ce qu'il y  de plus vivant! )

C'est très amusant, un peu stressant, franchement délirant et profond finalement. Ca se fait vieux, il paraît, et c'est un genre décalé (genre qui devient enfin (et même trop) populaire à notre époque). L'ambiance est très.. Stephen king. Dans plusieurs épisodes, l'atmosphère s'est retrouvée bien reproduite / correspondante au "style" que Stephen King a laissé derrière lui.


Battleground
: ( synopsis - Un Commando de sauvetage peu commun entreprend de s'attaquer à plus puissant que lui. A mille contre un, rien n'est gagné d'avance pourtant. )

Pas la moindre parole durant le film. A peine un "ha"!
D'abord pesant puis en fin de compte très relaxant. Evidemment, le but n'étant pas de parler devant ée show non-plus, je l'ai regarder deux fois en le présentant à quelqu'un. Il m'a vraiment bien fait rire! Ce n'est qu'un film d'action à la peau dure mais la présentation est très.. hum.. tendre.


Je recommande (à ceux qui ont du temps à perdre principalement) ces deux épisodes et même la "saison" entière pour les amateurs de films en tous genres.


11.22.63cobrate  (16.02.2017 à 10:48)

Nouveau livre de Stephen King, 22.11.63, adapté en série : 11.22.63. Ou comment sauver Kennedy... Apparemment, les critiques sont positives.


S. Kingelyxir  (23.12.2019 à 16:03)

Je n'ai lu "que" deux livres de Stephen King.

Carrie, son premier il me semble. Bien décrit, certaines scènes m'ont fait froid dans le dos mais magré tout, ça n'a pas été ma lecture préférée.

J'ai préféré La tempête du siècle pour le coup ! Une très bonne lecture ! 


Stephen Kingelyxir  (15.11.2022 à 10:59)

Autre livre lu de l'auteur : Colorado Kid. Autant dire que je ne m'attendais pas à ça... Le but du livre étant de ne pas avoir de résolution de l'énigme... C'est dur lol, on a pas l'habitude.

Identification requise pour ajouter un message.
Ne manque pas...

Alternative Awards : À vos nominés
Alternative Awards | On compte sur vous !

Activité récente
Actualités
Décès de Michael Kopsa

Décès de Michael Kopsa
Michael Kopsa qui incarnait Jake Truax est décédé le 23 octobre 2022 des suites d'une grave maladie...

Johnny Smith en visite chez Le Caméléon !

Johnny Smith en visite chez Le Caméléon !
Le sondage de l'été 2022 du quartier Le Caméléon vous propose de départager plusieurs épisodes de...

Nouveau design !

Nouveau design !
Le quartier Dead Zone vient de s'offrir un nouveau design pour renouveler les couleurs du site....

Chris Bruno | Sortie du film Torrance

Chris Bruno | Sortie du film Torrance
Le film Torrance réalisé par Gavin O'Connor sortira le 18 octobre 2019 aux Etats-Unis. Une sortie...

Focus sur Dead Zone

Focus sur Dead Zone
La newsletter du mois de décembre est tombée dans vos boîtes mail et vous invite à découvrir (ou...

Newsletter

Les nouveautés des séries et de notre site une fois par mois dans ta boîte mail ?

Inscris-toi maintenant

HypnoRooms

ShanInXYZ, 04.05.2024 à 18:09

Doctor Who ? C'est le nouveau jeu du quartier, un docteur à retrouver, à vous de jouer

choup37, 04.05.2024 à 21:22

Nouveau design sur Kaamelott, on attend vos avis

langedu74, 06.05.2024 à 21:15

Hello ! Une nouvelle session du ciné-émojis vient d'être lancée, rendez-vous sur HypnoClap pour deviner le film

Sonmi451, Avant-hier à 13:33

Nouveau design' dans Gilmore Girls, hésitez pas à donner votre avis!

CastleBeck, Hier à 23:08

Quatre quartiers sont en attente de clics dans les préférences. Merci pour eux.

Viens chatter !